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A Montréal, le jazz Allard et la manière

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Conférencejeanphilippeallard_marieclairedenis_011Pour la première fois depuis sa création en 2009, le Prix Bruce Lundvall décerné le 30 juin 2014 par le Festival International de Jazz de Montréal, récompense la France. On doit la distinction au producteur Jean-Philippe Allard, directeur des éditions Universal Publishing Group. «J’écoute de la musique, c’est mon métier», s’amuse le lauréat, épanoui. Dans la salle Stevie Wonder, rue Ste Catherine, au siège du Festival, l’ancien directeur général de Polydor brandit, ému, la statuette tendue par le directeur artistique, André Ménard. Que l’on ne s’arrête pas sur le caractère officiel de la cérémonie. Le protocole bon enfant dévoile un monde de musique et de merveilles.

Le sublimissime duo de Stan Getz et de Kenny Barron People Time? Au crédit de Monsieur Allard. L’ahurissant coffret de six CD du contrebassiste Charlie Haden The Montreal Tapes, gravées au festival en 1997 ? Au crédit de Monsieur Allard. Les derniers Abbey Lincoln, Joe Henderson, Kenny Barron, Randy Weston? Idem, idem, idem,  idem. On pourrait y consacrer un paragraphe, tant les artistes les plus capés du jazz se sont résolument tournés vers lui. La raison? «C’est un as», me glisse le journaliste spécialisé Alex Dutilh, «il comprend les intentions des jazzmen... les accepte... les réalise! Du coup, irrités par la politique artistique figée d’Universal Etats-Unis dans les années 90, informés de la qualité des prouesses du kador, ils l’ont sollicité». Bien leur en a pris. A la tête de Polydor, Allard avait travaillé avec Juliette Gréco, Maxime Le Forestier, Eddy Mitchell, Maurane, et j’en passe. Une expérience partielle. Il m’explique : «J’intervenais au stade final. En revanche, les jazzmen, eux, me sollicitaient dès la genèse de l’oeuvre. Ils m’impliquaient dès la genèse du projet. Gréco, elle, était en mesure de mener ses albums de bout en bout. On a tout de même enregistré avec le grand orchestre de Gil Goldstein aux USA.» Le premier musicien qui l’a poussé : le pianiste John Lewis, fondateur du Modern Jazz Quartet. 

Conférencejeanphilippeallard_marieclairedenis_001André Ménard (au micro sur la photo) ne déclare pas beaucoup d’amis dans la production, mais pour le coup n’hésite pas : «je lui réserve le qualificatif». Allard, de son côté, ne tarit pas d’éloges sur le festival canadien : «ici, les animateurs prennent des risques. Editer sept concerts de Charlie Haden, vous vous rendez compte? Ménard est un dingue de musique. Il sait reconnaître celle qui attire le succès, et reste intègre dans le même temps».

A quels paramètres le spécialiste renvoie-t-il la réussite du festival ? «Les trois mois d’été représentent une explosion de vie au Québec. Les organisateurs ont compris la soif de culture du public, se sont adaptés, ont trouvé la formule pour rassembler la foule. Vous étiez hier au concert gratuit de Diana Krall? Vous avez vu? De la folie! On aurait cru une fête de village!» Comme Marciac? «Oui, mais Marciac on le comprend, c’est dans un village». On pouvait effectivement toucher le bonheur du doigt au concert de Diana. Il poursuit l’analyse : «Montréal a joué habilement sur la proximité de New-York, certes vivier phénoménal de jazzmen ; hélas une municipalité incapable de monter une manifestation d’envergure

Dernier projet en date du producteur : la renaissance du label d’avant-garde Impulse. Le faiseur de miracles veut produire des albums accessibles. «On oublie que dans les premiers Impulse, il y a des Duke Ellington, des Coleman Hawkins, des Mingus, un Ray Charles, un Benny Carter». Le premier CD, signé Henry Butler et Steven Bernstein, inspiré par Fats Waller et Jelly Roll Morton, vient de sortir en France. En janvier, Allard exhumera quelques pépites : un Kenny Barron-Dave Holland, un Ran Blake, un trio acoustique Bireli Lagrene-Jean-Luc Ponty-Stanley Clarke, un Charlie Haden-Jim Hall. Avec l’irréfragable idée derrière la tête : que la bonne musique puisse aussi se vendre. Qui lui en tiendrait rigueur, sauf une poignée de puristes malencontreusement enclavés?

Bruno Pfeiffer

Crédit photos : Marie-Claire Denis


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